Un article de Libé sur Louise Bourgoin :
Ses œuvres complètes d’artiste inaboutie, métamorphosée en miss météo farfelue et jubilatoire, racontent assez précisément Louise Bourgoin. 1) Une mire télé, traitée à la Paul Klee, premier de ses travaux d’écolière aux beaux-arts, comme une prescience d’un avenir vraiment pas écrit. 2) Un détournement coquin des canevas de nos grands-mères, tableautins champêtres chinés aux puces et retravaillés en brodeuse lubrique. La biche brame au clair de lune ? C’est parce que le cerf l’entreprend virilement. 3) Enfin, un manifeste féministe en polyester : à défaut d’hommes-objets, des objets-hommes sur lesquels s’asseoir, se vautrer, s’allonger. Mode de production de cette bricoleuse multifonctions : «J’ai moulé un copain avec de la résine, après l’avoir vaseliné. Pour qu’il respire, je lui avais mis un porte-gobelet dans la bouche. Pour le libérer, j’avais prévu une ponceuse vibrante. Mais j’ai dû y aller avec de petits ciseaux et je l’ai entaillé de-ci de-là.»
«Au temps» la laisser parler. L’état civil la prénomme Ariane. Mais, chez Canal +, Ariane Massenet est déjà en plateau, et comme elle est bonne camarade, elle devient Louise. Clin d’œil à Louise Bourgeois, artiste qu’elle apprécie, comme elle aime Jeff Koons, Annette Messager ou Sophie Calle. Ce changement d’identité lui convient bien. Elle dit : «J’ai tendance à préférer Louise. A l’écran, elle est étudiée, contrôlée, parfaite. Louise, c’est l’Ariane que j’aurais voulu être. Elle est courageuse, elle dit les choses qu’Ariane n’ose pas dire.» Florilège des minutes nécessaires de mademoiselle Louise, qui se fiche des cumulonimbus mais trousse des compliments vachards et lunaires, azimutés et foireux, impertinents et délirants aux invités politiques et culturels qui passent dans les parages. 1) A Elisabeth Guigou : «Vous êtes ma patronne. Puisque vous avez été la garde des sottes.» 2) A Jude Law, en toute ingénuité, ne rougissant qu’a posteriori : «Je bois le jus de l’eau.» 3) A Christine Boutin : «Vous avez déclaré qu’au fondement de l’homosexualité il y a une souffrance. Mon colocataire homo est complètement d’accord avec vous. Il est même étonné que vous parliez si bien de cette délicieuse souffrance dans le fondement.» 4) A Nicolas Sarkozy : «Car, cher Nico… Oups, on m’avait pourtant bien dit de ne pas parler de Kärcher.» 5) A Schivardi : «Je vais voter pour vous, car je ne prends que du 0 %.» Vu le panel d’exemples retenus, on pourrait classer la dame à la gauche de la gauche. Mais prudence et circonspection… Elle reconnaît juste le consensuel vote Chirac 2002. Et se place sans risque aucun sous le patronage de Coluche et de «l’humour opposant à tous les pouvoirs». Cela ne l’empêche pas de se souvenir avec mélancolie des gloussements flûtés de feu Raymond Barre, ni de préférer assaisonner les politiques, qui, à l’inverse des acteurs, s’abstiennent de demander à lire à l’avance les interventions qu’elle écrit toute seule comme une grande.

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